C’en est fini pour la saison régulière. L’heure d’un petit bilan…
Suspens et regrets
On peut donner une bonne note à cet exercice 2024. Le suspens aura été de tous les instants, avec des changements de leaders et surtout une lutte à couper le souffle pour les play-offs. Et c’est là que les regrets surviennent. Les défaites par pénalité de La Rochelle (XX journée contre Savigny, infraction aux règles concernant les joueurs sous extension de licence) et de Metz (13è journée contre Montigny, infraction aux règles concernant les JFL) nous ont privé d’une dernière journée où tout aurait été possible. Les Cometz peuvent vraiment s’en vouloir : ils ont perdu un match qu’ils avaient gagné, et le changement effectué n’a pas vraiment influencé le cours du jeu. Sans ce contre-temps, ils auraient pu se qualifier pour les play-offs. Dommage, mais la loi est la loi…
La force de l’habitude
Oui, il y a eu du suspens, mais au final, ce sont des habitués qui se retrouvent en demi-finale. Sur les 21 demi-finales (ou poule demi-finales) disputées depuis 2002 (2019 est mis à part, il n’y avait pas de ½ finale mais une poule de play-offs de 6 équipes), ce sera la 20è participation de Rouen, la 18è de Montpellier, la 14è de Savigny et la 6è de Toulouse. Ce sont 4 des 5 équipes qui ont été le plus souvent en ½ finale, il ne manque que Sénart et ses 16 participations.
Où sont les Français ?
On ne parle pas des lanceurs : la règles de JFL a fait son œuvre. Près de 52 % des manches ont été lancées par des JFL, contre 36 % l’an passé. Dans l’ordre d’utilisation, on trouve : Savigny (63,8 %), Toulouse (61,4 %), Rouen (56,9 %), Sénart (52,7 %), Montigny (47,6 %), Metz (47,3 %), Montpellier (42, 5 %), La Rochelle (42,0 %).
Mais là où c’est un véritable désert pour les joueurs français, c’est le poste d’arrêt-court. La Rochelle (Crawford), Metz (Ruiz), Montpellier (Spring / Bustamante), Rouen (Defries), Savigny (Tissera) ont donné toutes les manches à un étranger. Toulouse à fait presque de même, avec Perdomo / A.Soriano, et 6 apparitions pour Navarro. A Montigny, Velazquez n’a cédé sa place qu’à quelques prerises, au profit le plus souvent de Lassaline. A Sénart, c’est Brown qui a été le plus souvent titulaire, mais le jeune Laufenbuchler a joué 13 matches, avec toutefois 9 erreurs et une moyenne au bâton décevante. C’est donc une vraie inquiétude pour l’équipe de France, car, avec tout le respect qu’on doit à l’immense carrière de Felix Brown, il ne représente plus vraiment l’avenir. Le successeur de Maxime Lefevre n’a toujours pas été trouvé, et c’est un problème sur lequel il convient de se pencher au plus vite.
Une autre position stratégique est aussi touchée, mais de manière moins importante, celle de receveur. A Metz, on a fait confiance uniquement à Algeni. A Montigny, c’est Do Carmo et Lot-Martin qui ont fait l’essentiel du travail. A Savigny, Acuna a été le principal titulaire. Le temps de jeu a été plus partagé à La Rochelle (Gonzales et Pierre) et Sénart (Nakamura et Doyen), mais avec une priorité au joueur étranger. Excès inverse à Montpellier où Kovacs a catché toutes les manches, ce qui est sans doute trop et a pesé sur ses performances défensives (18 balles passées, 14 vols de bases sur 52 tentatives). A Rouen, Gleeson a confirmé sa solidité (aucune erreur, 5 balles passées) mais son impact offensif a diminué. Il a partagé son temps de travail avec Cerda et Brainville. A Toulouse c’est le duo Garcia – Blancot qui a été utilisé en grande majorité, mais là aussi avec un potentiel offensif plus limité. On n’est pas non plus totalement rassuré à cette position pour l’équipe nationale.
Des bleus dans les stats
Les français sont relativement bien présents dans les statistiques. Certes, Ruiz (Metz), Defries et Smith (Rouen), Acuna (Savigny), Rodriguez (Montpellier) trustent les premières places. Mais les tricolores sont assez bien nantis, avec même une première place pour Jiminian (Savigny) dans les doubles, pour Brossier (Montpellier) et Briones (La Rochelle) pour les triples, M. Esteban (La Rochelle) pour le moyenne avec des coureurs en position de marquer.
Cela se passe bien pour les RBI, avec un triplé de montpellierains (Antonac, Brossier, Kovacs), M.Esteban (La Rochelle) et A.Amoros (Savigny) au 5ème rang avec, ou pour le buts sur balles où on retrouve Viger (Savigny) 4è, M. Esteban et Briones (La Rochelle) 5è. Bon point aussi pour les bases volées, Jiminian (Savigny) est 2è, Baisse-Depontieu (Toulouse) 5è. Jiminian est également 2è pour les extra-bases. Blondel (Rouen) est 4è en average et 2è en one-base, Jiminian 5è en slugging.
Du côté des lanceurs, c’est le rouennais Prioul qui se distingue le plus souvent : 1er pour les victoires, 5ème pour l’ERA, 4ème pour le batting average, 3ème pour le slugging. Mention aussi pour De La Rosa, qui n’est certes pas JFL mais évolue en équipe de France, qui termine 1er pour les strike-outs et 2ème pour les K/9 manches.
Le retour du roi ?
Après une saison 2022 totalement vierge et un challenge de France complètement raté, venant après un début de saison plus que médiocre, on ne donnait pas cher de la peau des Huskies. Mais la « culture de la victoire », que les rouennais prétendent posséder depuis plus de vingt ans, semble encore couler dans les veines des chiens de traineau. Ils ont formidablement renversé la barque et roulé sur la concurrence lors de la deuxième partie de saison (13 victoires – 1 défaite), portés par le formidable duo offensif Defries – Smith et un pitching à la profondeur inégalée. Les Huskies abordent les play-offs en position de force, avec un line-up très bien équilibré (le rôle de Toubeaux et de Harrison n’est pas à négliger), le renfort de Q.Moulin au monticule et une envie d’oublier que les trois derniers titres (championnat et challenge) leur ont échappé, ce qui ne leur était jamais arrivé. Il reste quelques interrogations sur le niveau de concentration, la solidité défensive et le manque d’expérience, mais on va répéter ce qui se dit depuis tant d’années : pour être champion, il va falloir battre Rouen, et ce n’est pas facile.
Les survivants
Savigny, Montpellier et Toulouse n’ont pas eu une saison de tout repos.
Les Lions se sont beaucoup appuyé sur le duo Jiminian – Acuna en attaque, sur une saison solide de Coste (7 départs de qualité) et sur le travail phénoménal de Orozco. Mais Romero n’a pas apporté grand-chose au pitching et ont manqué d’appui offensif, à l’exception des frères Amoros. Résultat, une saison en dent de scie, avec ses séries de victoires et de défaites qui se sont succédé, mais au total, les Lions restent une force du championnat, même si leur profondeur au pitching peut causer des soucis si une série se prolonge.
Montpellier a été durement frappé par les blessures, bien sûr celles de Sigiura et Pontiac mais surtout celle de Ben Couvreur. Nul doute que la saison des Barracudas aurait été plus simple si le jeune prodige avait pu tenir sa place sur la butte. Mais Montpellier a fait preuve de sa profondeur et de sa solidité en gagnant le Challenge, avec une line-up assez complet où Douglas Rodriguez fait toujours parler la poudre (.406, meilleure moyenne de la saison). Il faudra faire sans Antonac et ses 18 RBI et sans Zan pour les play-offs, mais Montpellier ne lâchera pas son titre si facilement et reste bien placé pour une passe de trois.
Toulouse a survolé le début de saison (8-2 à ses 10 premiers matches) avant de connaitre un sérieux trou d’air (3-9 dans les 12 matches suivants), puis de profiter d’une fin de calendrier plus simple avec 3 victoires consécutives contre Montigny et Sénart (qui venaient après une série de 4 défaites et ont été suivies par 3 autres défaites) pour finalement arracher la 4è place. Une démonstration de cette saison étrange, les toulousains étaient les rois des victoires par un point d’écart en début de saison, en remportant 5 de ces confrontations, ils en sont devenus les plus mauvais, en perdant les 5 suivantes. Toutefois, le retour de Rojas donne des muscles aux toulousains, qui restent fragile au pitching. L’absence de Navarro pèse lourd tant en défense qu’en attaque, mais les vieux briscards de l’avant-champ (Soriano, Perdomo, Mendoza) et les jeunes loups du champ extérieur (Baisse-Depontieu, Cegielski, Saumande) ont des arguments à faire valoir. Toulouse ne sera pas une proie facile.
Les battus de justesse
Metz a su profiter de son solide recrutement étranger, et l’arrivée de Paula en cours de saison a fait beaucoup de bien. Matthéo Launay a changé de dimension au monticule, avec une superbe fin de saison, mais les Cometz souffrent d’un bas de line-up trop fragule (.191 pour S.Hansch, .153 et 32 strike-outs pour Cailteux, .156 pour Maimbourg, .182 pour Takezawa). Le modèle messins reste donc fragile, reposant beaucoup sur les imports, même si une nouvelle génération commence à émerger.
A contrario, les recrues de La Rochelle n’ont pas su s’imposer suffisamment, à l’exception de Johnson, qui n’avait pas commencé la saison avec les Boucaniers. Gonzalez a été solide derrière le marbre, mais .229 de moyenne c’est insuffisant pour un joueur étranger, Izquiedro a disparu des radars et Escorcha n’a pas vraiment fait la différence (3-2, 2,70). La bonne nouvelle a été l’excellence saison de De La Rosa, la meilleure de sa carrière et la montée en puissance de jeunes, à l’image de Briones et Pierre, qui laissent entrevoir des lendemains qui chantent.
Qui va descendre ?
Un grand nom du baseball français va quitter la D1. Sénart, une des forces de ces vingt dernières années et Montigny, qui sortait de la meilleure saison de son histoire. Pour les Cougars, ce fut vraiment compliqué. La saison s’achève avec un différentiel catastrophique de – 139, et un pitching JFL qui a sombré (9,69 de ERA). Le recrutement n’a rien apporté, Soliveres trop souvent absent, Coopman irrégulier, Lot-Martin insuffisant (.174). Du côté des Templiers, ils ont su redresser la barre après 4 défaites de suite pour commencer la saison, mais ce fut là aussi difficile. La cure de rajeunissement a été évidente (Ouanyou, Tshibambe, Brelle…), mais le manque d’expérience a pesé lourd. Les absences de Meurant, Nayral (excellent pendant son court séjour) et Bouniol font très mal en fin de saison, et le recrutement étranger, sans être mauvaise, a été moyen (4,80 de ERA pour Kurima, .273 pour Nakamura, .315 pour Ogawa).
Cela posé, Montigny peut s’en sortir, en profitant des règlements JFL. En effet, il est demandé 7 manches sur un programme double et 10 sur un programme triple. Ce qui ouvre la possibilité pour les Cougars de s’appuyer sur ses lanceurs étrangers dans 3 matches sur 5. Mastre a été extrêmement dominant en fin de saison. Si on enlève une sortie difficile contre Montpellier, il n’a donné aucun point en 27 manches à ses 4 derniers matches et lancé 35 strike-outs. Avec un Lopez qui peut toujours, lui aussi, faire la différence, Montigny pourrait renverser Sénart.
F.Colombier