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Parfait et rare

Depuis onze ans, nous ne parlions plus de ce phénomène jugé comme presque impossible de nos jours. Domingo German, lanceur des Yankees, a réussi l’exploit de réaliser un match parfait avec 9 strikeouts et 9 IP contre les Athletics.

Pourquoi s’agit-il d’un exploit ?

Tout d’abord à cause de sa rareté et nous ne parlons ici que des USA et de la MLB. Le match parfait de German n’est que le 24ème depuis plus de 150 ans, à savoir qu’un tel match se réalise statistiquement tous les 200 000 matchs. Ensuite, parce que le jeu a évolué et qu’aujourd’hui, les lanceurs partants lancent environ 6 à 7 manches, puis se font remplacer par des releveurs qui peuvent à leur tour être relevés. La proportion de matchs lancés sur 9 manches par le même lanceur a donc considérablement baissé. C’est un exploit enfin, car c’est un travail collectif. En fait, le match parfait de parfait serait celui où le lanceur lancerait 81 strikes, réaliserait ainsi 27 strikeouts. Ce n’est jamais arrivé. Le meilleur match parfait comptabilise 14 strikeouts aux USA (en 1965, Sandy Koufax pour les Dodgers) et 19 au Japon (Roki Sasaki en 2022).

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L’aventure et l’histoire d’un match parfait se déroule quasiment de la même manière. Au début, les batteurs sont éliminés un à un pendant les trois premières manches, que ce soit sur strikeout ou élimination en première ou fly out. Pendant les 4ème, 5ème et 6ème manche la marque est à 0 pour l’équipe adverse et quelques joueurs et le manager laissent poindre l’idée que c’est bien et espèrent que cela dure.

Arrivé en 7ème manche, le match parfait est dans toutes les têtes des joueurs des deux équipes, des coachs et des spectateurs. Une certaine tension commence à s’installer car un simple hit by pitch, une erreur d’un défenseur ou un hit voir un homerun peuvent tout faire s’écrouler. Dans l’équipe du lanceur partant, une forme d’égrégore de concentration dans ce seul but s’installe. C’est là que l’on touche la beauté et l’exploit qui se dessine. Tous les esprits convergent tellement fort vers ce but que personne ne veut être celui qui ferait que l’exploit serait abandonné. Seul le lanceur a son destin entre les mains. A ce stade-là, le manager décide de laisser son lanceur faire. D’ailleurs souvent la victoire devient secondaire, elle est même souvent déjà acquise. Les deux dernières manches forment une sorte de pyramide au somment duquel le lanceur forme le pyramidion. Les autres joueurs vont se solidariser en-dessous de lui et vont chercher à former ensemble l’exploit. Tout peut arriver, il existe même un cas incroyable ou c’est l’arbitre qui a cassé un match parfait : Armando Calarraga est à un retrait du match parfait, Jason Donald frappe en deux, retrait logique et presque évident en première base, mais l’arbitre accorde la base à Jason Donald. L’arbitre Jim Joyce s’excusa de son erreur par la suite et écrivit même un livre (Nobody is perfect) avec le lanceur Calarraga.

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Il est souvent remarqué qu’un match parfait est le résultat d’un match entre deux équipes qui ont un niveau de jeu assez disparate. Il est vrai pour le match de German que les joueurs de Oakland sont les moins bons de l’american league. Mais cela n’enlève rien à l’exploit. En 1904, le fameux Cy Young, dont le nom aujourd’hui illustre le trophée du meilleur lanceur d’une saison, avait dit que son match parfait était facile du fait que les Atheltics, à l’époque à Philadelphie, étaient nettement moins bons que les Americans de Boston à l’époque.

Le baseball possède, de part son amour des statistiques et ses règles de jeu, la possibilité de marquer dans le marbre quelques raretés comme le match parfait. Il est plus difficile de sentir ce graal ailleurs dans un autre sport. Dans le football, on compte les buts comme on compte les homeruns en baseball. Mais cela reste des statistiques d’addition sur toute une carrière. Le match parfait est une comète étincelante, une éphémère explosion d’un homme et son équipe sur un temps court.

Quand on regarde les autres ligues mondiales, on dénombre 16 matchs parfaits au Japon, 3 en Hollande, 3 en chine, 1 à Cuba, aucun en Australie et aucun en France. Enfin, il y en a peut-être eu en France mais les statistiques n’existant que depuis disons le 21ème siècle, on ne sait pas vraiment pour le vingtième siècle…

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Pour bien comprendre la psychologie du lanceur et de son équipe, et notamment de son catcheur, le plus proche collaborateur et acolyte, il est bien de revoir un très bon film avec Kevin Costner de 1999 : Pour l’amour du jeu. On suit en flashback la vie du lanceur entre les manches et on assiste à la montée en puissance du match au fur et à mesure que l’exploit du match parfait se dessine. Un must pour tout passionné de baseball !

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