Nous sommes en 2019. Le baseball français, habituellement discret, se réveille un matin avec une annonce qui semble tout droit sortie d’un rêve. Bruce Bochy — oui, le Bruce Bochy, légende de la MLB, triple vainqueur des World Series avec les San Francisco Giants — va devenir le coach de l’équipe de France pour les qualifications à la World Baseball Classic.
Un tremblement de terre dans l’Hexagone.

Passé l’incrédulité, c’est l’effervescence : journalistes, passionnés, clubs, tous veulent en être. Les interviews s’enchaînent, les articles fleurissent, et les réseaux s’enflamment. L’un d’entre eux, Scott Stevenson, Américain installé depuis longtemps en France, sent immédiatement qu’il se passe quelque chose d’unique. Monteur image de profession, il vit le baseball au quotidien grâce à son fils, joueur à Montigny et Saint-Germain-en-Laye. Il décide alors de sortir sa caméra : il faut garder une trace de cette aventure.
« Je me trouvais aux États-Unis, raconte-t-il. J’ai trouvé juste les moyens minimums pour être là, le matin du premier entraînement, en Arizona, le 2 mars 2020. J’ai commencé à filmer alors que tout débutait encore là-bas. »

Autour de Bochy, les joueurs vivent un rêve éveillé. Rencontrer un monument du baseball mondial, parler stratégie, partager le terrain avec un homme qui a tutoyé les sommets, c’est une expérience inoubliable. Tous le disent : ils donneront tout pour ce maillot bleu frappé du coq.
À la Fédération, Didier Seminet, alors président, se souvient : tout est parti d’une rencontre… autour d’une bouteille de Bordeaux. Car Bochy, avant d’être une icône du baseball américain, est né à Bussac-Forêt, en Nouvelle-Aquitaine. Le projet prend alors tout son sens. À l’heure où il s’apprêtait à savourer une retraite tranquille, (On saura plus tard que la retraite n’aura pas sonné, elle fut même auréolé d’un nouveau titre MLB avec les Rangers). L’idée de renouer avec ses racines séduit l’homme.

Mais l’histoire bascule brutalement. Le Covid s’invite dans la partie. Confinements, restrictions, compétitions annulées : le rêve s’interrompt net. La déception est immense. Pourtant, Scott ne lâche rien.
Puis vient le tournoi enfin. Scott est de nouveau sur le pont :
« J’ai eu un mois de préavis, explique-t-il. Il a fallu tout arrêter, trouver une équipe, du matériel, et filer sur place pour capter ce moment. On a suivi Bochy sur les routes, de son lieu de naissance à Bussac-Forêt jusqu’à Toulouse, puis direction Regensburg, en Allemagne, pour la compétition. »
« J’avais très peu de budget, confie-t-il. C’était du système D, mais la volonté d’aller au bout était plus forte. Avec mon producteur anglais et une petite équipe, on a continué entre Toulouse et l’Allemagne. Puis Bochy était reparti, mais l’histoire, elle, devait être racontée. »

Le documentaire voit finalement le jour. Bochy et les bleus — 77 minutes d’émotion pure. On y retrouve les regards émerveillés des joueurs, les espoirs fous d’une qualification, et cette énergie contagieuse de tout un sport qui se met à y croire. Pas de miracle sur le terrain, mais un rêve collectif qui a réveillé le baseball français.
La première projection a eu lieu à Clermont-Ferrand en septembre dernier, à l’initiative du club des Avernes. D’autres suivront : la Fédération souhaite faire vivre ce film dans les clubs, les écoles, et les associations, partout où bat le cœur du baseball tricolore.
Parce qu’au fond, plus qu’une histoire de sport, Bochy et les bleus », c’est l’histoire d’une rencontre, d’un rêve devenu possible, et d’une passion qui refuse de s’éteindre.
